Je fais toujours les choses à moitié, je m'arrête toujours en chemin. Tout est inabouti en ma demeure, l'élan s'étiole dès les commencements, et je ne termine presque jamais rien. Les projets restent des mois et des années en suspens, des petits riens sans grande ambition. Je les cultive longtemps dans l'ombre et l'incertain. Ma psychanalyste que je ne vois plus dirait sans doute qu'il faut le temps de la maturation et que c'est ainsi. Pas de quoi culpabiliser. Tel serait mon fonctionnement et ma névrose : la procrastination est une forme de maturation.
La fin de l'été approche et les idées qui ont fleuri auparavant, comme par étourderie, dans une folie ordinaire, dans une euphorie passagère et insensée, se dissiperont peut-être dans l'hiver prochain. C'est la valse des saisons qui ne cesse de tournoyer. Déjà, mais sans hâte, je languis l'automne. Hélas, l'heure de la reprise du travail et de la comédie en société sonne aussi : ce coup de frein au rêve et au désir. Il n'y a rien de plus aliénant et de plus déprimant.
Avec les années cependant, j'ai appris l'anesthésie mentale. Plus je vieillis et plus je sombre dans une indifférence au monde et à l'action. Et les nouvelles des humains sont toujours aussi navrantes.