jeudi 17 juin 2021

Rêveries d'une passante solitaire

Dernier jour de cours pour moi, je vais clore cette année scolaire placée sous le thème de la musique avec Accords et désaccords, l'excellent film de Woody Allen. Je suis à peu près certaine que les jeunes ne le connaissent pas, et je ne suis pas certaine qu'ils apprécient. Néanmoins, qui sait ?

Souvent, je suis gagnée par la lassitude d'enseigner. Lassitude qui augmente lorsque l'on approche l'été et la chaleur étouffante. Les cerveaux, déjà peu remplis en général, semblent encore plus se vider à la fin de l'année scolaire. Il n'y a plus que leurs écrans qui les intéressent, pour une grande majorité. Leurs écrans, leurs réseaux sociaux, leurs films ou séries Netflix, et quoi d'autres ? Je ne voudrais pas insinuer qu'ils n'ont pas de culture, ni brosser un portrait trop négatif de ces jeunes à qui j'essaie d'enseigner quelques compétences rédactionnelles, de transmettre quelques connaissances en "culture générale", d'éveiller un peu leur curiosité, de tenter de leur faire réfléchir sur le monde et sur eux-mêmes, de construire avec eux un regard critique et réflexif, d'insuffler un peu de poésie, etc., mais ils sont en fin de compte bien peu - une grande minorité, à s'intéresser à ce qui sort de leur ordinaire : de leur "zone de confort", comme on dirait de nos jours, expression managériale des plus à la mode aujourd'hui... (On la sort et la répète à toutes les sauces, mais sait-on vraiment ce qu'elle signifie ?) 

Peut-être, exprime-t-elle bien, finalement, quelque chose de l'humaine condition : quelque chose d'une fausse profondeur. Une profondeur superficielle. Une expression qui prétendrait être d'une profonde intelligence, qui en donnerait l'illusion en tout cas, à celui qui en userait. 

Pour ma part, je peine de plus en plus à sortir de ma zone de confort. 

Ma zone de confort, ce sont mes éternelles rêveries. Mes rêveries au bord des eaux. Et je relis actuellement la préface de L'Eau et les Rêves de Gaston Bachelard. Je crois par ailleurs qu'il n'y a pas plus poète que ce philosophe :

"On rêve avant de contempler. Avant d'être un spectacle conscient tout paysage est une expérience onirique. On ne regarde avec une passion esthétique que les paysages qu'on a d'abord vus en rêve."

N'y a-t-il pas plus joli renversement ? 


La peine de l'eau est infinie. Je retrouve toujours la même mélancolie devant les eaux dormantes, une mélancolie très spéciale qui a la couleur d'une mare dans une forêt humide, une mélancolie sans oppression, songeuse, lente, calme. En ce qui touche ma rêverie, ce n'est pas l'infini que je trouve dans les eaux, c'est la profondeur. L'eau anonyme sait tous mes secrets. Une goutte d'eau puissante suffit pour créer un monde et pour dissoudre la nuit.

2 commentaires:

  1. Back when dinosaurs roamed the earth and I was in school-- It usually took a month or two after the end of classes for me to really look back and take stock of what had stuck in my brain. Usually I was surprised by how much was there. And I remember those times from more than a half century ago as if they were yesterday. Teaching is difficult sometimes, but one learns so much by teaching others.

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    1. Back when dinosaurs roamed the earth ? It was a long long very long time ago ! :-D
      Thanks for sharing your point of view.

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